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Défi de l’an 15-Troublante rencontre

Troublante rencontre
Je me promenais dans mon jardin. Voilà, que de partout, arrivaient les oiseaux. Ils sifflaient joyeusement, harmonieusement. Charmée, je les écoutais ; mêlée à ce concert, une voix, une voix qui disait :
Ecrivez, écrivains, scribes en herbe, ou de métier
Contez, racontez, dites-nous,
Récits fabuleux, romans idéalistes, historiques,
Inventez images chimériques, véritables
Trouvez les mots, les phrases, partagez vos valeurs,
Osez dire ce que vous pensez, aimez,
Invitez au partage de vos savoirs, de vos goûts,
Réfléchissez avec nous, rimez en vers ou en prose,
Etonnez-nous, émerveillez-nous, aimez-nous.
Je me dirigeais vers le lieu, d’où semblait venir la voix.

Nonchalamment installé sur la balancelle, un luth à ses pieds, se tenait un homme, vêtu de façon inhabituelle.
– Bonjour monsieur. Qu’écrivez-vous ?troubadour-02
– Une ode à mon écritoire, gente dame.
– Vous participez à un festival d’écriture ?
– Je suis Troubadour, pour vous servir, noble dame.
– Un troubadour, ce qui explique votre déguisement.
– Déguisé, ne suis point ; je parcours villes et campagnes, ainsi accoutré. Les oiseaux me tiennent compagnie, pour des aubades musicales, dans les cours seigneuriales, autant que sur les places des marchés. Telle est ma vie. Votre jardin m’inspirait, pour parfaire cet acrostiche dédié à l’écritoire que voici.
Il me montra une sorte de pupitre, deux bandoulières lui permettant de le transporter en tous lieux, en tous temps.
– Je dois vous laisser. Adishatz, belle dame. Peut-être nous reverrons-nous.
– Je l’espère, aussi. Passez quand vous voulez. Vous serez toujours le bienvenu.

Ecritoire en bandoulière, les doigts effleurant son luth, il quitta mon jardin, suivi d’une nuée multicolore d’oiseaux.

La Lâcheté était à l’ordre du jour

Dire, ce matin, la lâcheté : ils ont tué d’abord deux personnes : les deux policiers qui faisaient leur devoir et gardaient la porte.

Puis ils sont allés dans cette salle de réunion, et ils ont tué 10 personnes en 5 minutes, soient 2 à la minute, le temps de compter 30 secondes et clac, un mort ; 30 secondes et clac, un humain à terre ; 30 secondes, et clac, une vie fauchée. Dix fois ce même geste. Contre des personnes qui n’avaient que crayons et stylos pour se défendre : bel acte de couardise.

Et si encore ils s’en étaient pris à des jeunes athlètes entraînés à la lutte ! Mais au contraire : sur les dix abattus, huit sont des seniors : Jean Cabut, 76 ans, Elsa Cayat, 54 ans. Georges Wolinski, 80 ans, Bernard Verlhac, 57 ans, Bernard Maris, 63 ans, Philippe Honoré, 73 ans, Mustapha Ourrad, 61 ans ; Michel Renaud, 69 ans ;

Seuls, Stéphane Charbonnier, 47 ans et Frédéric Boisseau, 42 ans, et font figure de « jeunes » dans le tableau de chasse.

Les tueurs ? la trentaine . Ceux qui les ont envoyés, ceux qui les ont préparés, ceux qui les ont armés ont de quoi être fiers. Ils ont droit à tout notre mépris.

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Défi de l’an 15 / 9 – J’ose écrire, par Jacou

Défi de l’an 15-

J’ose écrire, ce lendemain du 7 janvier 2015.
Ecrire est une arme pacifique.
Je ne peux imaginer une rencontre avec les êtres assassinés
Hors les réseaux sociaux.
Ces réseaux sociaux, dont on ne peut guère se passer, aujourd’hui.
Ces mêmes réseaux sociaux, qui, hélas, véhiculent tout.
Véhiculent ces idées sordides, frappent vite, aveuglément,
Séduisent des êtres,
Que je ne me sens pas le droit de juger.
A travers ces moyens rapides de communiquer,
Faisant le tour de la planète, en un clin d’œil,
Exprimons-nous tous ensemble,
Unissons-nous.
C’est mon défi de l’an 15.

Défi de l’An 15 / Poesie – La Ville, par Florence Noel

la ville
et c’est l’homme seul en mouvement
son ombre chevauchant les pavés
déchaussés
l’homme aux pieds tantôt avides
tantôt repus
et qui s’invite au fleuve
où la passerelle reflue
sous les grands dais bleuis de
nuit
c’est l’homme avançant vers sa mort
mourant aux autres, au monde
puis d’une prise de gel
figeant l’air dans sa narine
c’est l’homme retroussant
les lèvres sur un désir
de fièvre
fine lame sur la joue

tandis qu’au loin
une cloche s’obstine

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Florence Noel, 5 janvier 2015

Défis de l’An 15 / Texte libre 1 – A pis new year, par Olivier

Saloperie de S.A.V…

 A intervalle régulier je réitère ma plainte, mais je n’obtiens jamais de réponse.

Ils font la sourde oreille, ou plutôt l’œil aveugle. C’est quand même un comble, puis ça fait un moment que ça dure et le manque d’intérêt de ces gens m’exaspère.

Je sais que l’on ne construit plus rien pour durer, mais depuis le temps, ils auraient pu sérieusement se pencher sur le problème. Mais non, c’est dans l’indifférence totale qu’ils continuent à livrer, à date fixe, la même matière sans pour autant en augmenter la durée de vie et donc, comme à chaque fois, on doit finir par en faire le deuil alors qu’ils pourraient être simple d’en pérenniser l’ensemble une bonne fois pour toute.

 Evidemment, la plupart des garanties ne dure qu’un an, mais là ça commence à se voir que c’est bien un arrangement commercial et manufacturier pour que cela ne dure pas plus de 365 jours. Et là, pan, c’est foutu, bon pour la poubelle, et tout ça pour en consumer une nouvelle qui ne tiendra pas plus longtemps que la précédente, et tout le monde laisse faire, fait même la fête, comme si l’on fêtait tout ce que l’on met à la casse ou accroche à la patère du passé.

 Alors, à quand une véritable extension à ces fragments d’éternité ?

Surtout que l’on ne fait qu’un copier-coller calendaire. Il serait temps, c’est le cas de le dire, d’y joindre une rallonge définitive à ce qui ne fait que se répéter.

Alors, un jour, les maîtres du temps consentiront peut-être à en libérer la durée ?

En attendant, nous sommes condamnés à fêter le renouvellement annuel, au cas où un jour elle ne soit pas remplacée.

Pour ce changement de chiffre, fêtes et cotillons se pareront d’illusions et ce nouvel horizon vierge se chargera de ce que vous pourrez y apporter. Alors emplissez le de joies, bontés, sourires, amitiés, compassion et ne le laissez pas se parasiter des pressions sociétaires qui vous entourent pour mieux vous oppresser.

Cette nouvelle année qui démarre n’attends que vous pour s’éclairer.

Pour que 2015 soit bon, il ne tient qu’à vous d’y veiller.    ;o)

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Olivier, 4 Janvier 2015

Défi de l ‘An 15 – 7 / Carnets soi-disant paresseux

– D’abord, es-tu vraiment paresseux, dit-elle, je ne crois pas – chut, ne répond pas.

– Mais tu demandes ..

– Je ne demande pas. Ce n’est pas une question, c’est une affirmation : où paresseux vois-tu être ? Je ne vois pas.

Dit-elle

Ils sont arrivés dans un espace bizarre rempli de minarets et de hauts clochers en forme de cathédrale, où les tapis volent emportant des Jacous imaginaires filant vers les jardins vosgiens. Ils sont ensemble en attente des autres, qui semblables à eux souvent jonglent avec les lettres et les mots, les virgules et les points d’exclamation. Rendez-vous a été donné ici, dans un jardin. O Babylone la Grande des temps enfuis.

Un brin maussade, le mal de l’air, même sur un tapis, et tous ces minarets pointus autour de soi vus d’en haut pendant le voyage.

– Mais je me sais paresseux, dit-il, rieur

Il rit beaucoup, largement. Impression de force tranquille renforcée par son emblème cahotante, petit canard même pas boiteux, encore enfantin, caneton dont on devine le duvet clair de l’enfance.

– Je ne suis pourtant pas si jeune , commence-t-il parce que, ici, il peut lire les pensées.

Mais elle le fait taire, du haut de ses longs ans dont elle est largement pourvue. Péremptoire, rigolarde, définitive, institutrice.

Le rêve est fait pour rester hors du temps.

– Ou ranges-tu tes Carnets ? , demande-t-elle.

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lmg, 4 janvier 2015

 

Le Défi de l’An 15 – 6 / Jacou

Du mascaret aux volutes des papillons heureux, où rencontrer Jacou ? Elle est libre comme l’air, aussi fugitive que le vent, et se balade d’un continent à l’autre sur son tapis volant. Difficile de lui fixer un rendez-vous, avouez-le.

Mais que nous parlions en poète et la voici au coin d’une fleur, sensible aux mots et aux images, palpitante d’émotions douces, de couleurs diaprées. Cachée à l’ombre d’une feuille, c’est au fond du jardin, sous les cerisiers de Cloclo que nous la rencontrerons, et nous jouerons longtemps ensemble avec les mots, les phrases et les couleurs de notre langage commun.

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Lmg, 4 janvier 2015

 

Premier Janvier 2015 : Ecrire

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Écrire en 2015

Le sujet en ce premier jour de la nouvelle année sur Écritoire ne peut être que l’Écriture. Tout autre serait pire que déplacé : indécent.

Parce que ÉCRIRE reste le centre de la vie de vous tous qui venez poser ici vos mots et vos pensées. Écrire, un geste – appelez-le aussi occupation, ou passion – consistant à taper sur un clavier pour relier ou non des signes entre eux. Écrire, ce n’est que cela, finalement. Écrire, c’est tout cela.

Lire et écrire, les deux premiers enseignement reçus par chaque petits humain dés ses jeunes années. Demandons à celui-ci ou celle-là quand il ou elle a appris à lire et à écrire. La plupart du temps, ils n’en savent plus rien ; ils ont oublié ; il leur semble que lecture et écriture font partie d’eux-mêmes depuis le commencement de leur vie, comme respir et langage. Comme battements sourds du cœur, comme vie des artères. Mots traducteurs, conducteurs de la pensée. Laquelle se meut par ondes venues de quel épicentre, nous n’en avons aucune idée et vivons fort bien toute notre vie avec cette ignorance.

Des que nous avons compris que nous pouvons, avec notre main tenant le crayon, faire jaillir a la vue des autres ce que nous ressentons ( le premier message d’amour sur la carte de la Fête des Mères : « Maman, je t’aime «)  ou, plus tard, sur le tableau de la cuisine ( «  Jean, tu as du rôti froid et de la soupe dans le bol bleu dans le réfrigérateur «  ) L‘essentiel étant le déversement de nos émotions ou de nos besoins sous forme de signes, lettres assemblées en mots ; mots accrochés en phrases ; phrases liées en gerbes, en paragraphes ; pages retenues en chapitres.

Lecture, nos mains tournent les feuilles, ouvrent ou ferment le livre, glissent sur l’écran. Nous allons cueillir d’autres émotions, d’autres besoins qui furent écrits par d’autres ; lectures, la quête incertaine, la chasse allègre, la recherche d’un ailleurs, a travers toujours les mêmes signes, les mêmes émotions.

Car ne nous y trompons pas : nous ne recherchons rien d’autre, chez l’Autre, que notre propre reflet. Et pour le trouver, nous n’avons qu’un seul miroir : les mots. Il arrive, j’en ai fait l’expérience, que nous décidions en toute connaissance de cause d’aller vers l’Autre sans l’aide des mots. Nous en sortons toujours perdants, avec le sentiment pénible d’un temps précieux, perdu. C’est que par delà le même mot, la résonance peut être devenue différente : il suffit parfois, dans la relation uniquement orale, d’accents autres, de construction de phrases opposées, de sens contraires : telle amie à qui je lançais, admirative, qu’elle était précieuse et qui me rétorquait, outragée, qu’elle était pourtant très frugale.

Ou mes monologues avec ma grand-mère enclose hermétiquement dans sa surdité. Elle avait, dans sa poche, un petit carnet dans lequel j’écrivais mes questions : nous limitions ainsi nos relations à des mots simples, des interrogations directes, des recettes de cuisine ou de vie : «  comment as-tu fait pour survivre après la mort de Papé ? »  écrivais-je. Elle me répondait oralement – hélas. Aurions-nous eu l’internet, elle et moi, en ce temps là, j’aurais pu garder ses réponses, aujourd’hui envolées, disparues.

J’ai retrouvé un de ces carnets, bourré de questions, de mon écriture enfantine ; il est question de ce que mange le chat tigré, de salade de poireaux sauvages, et de mes conflits scolaires. Rien de transcendant, mais qui faisait alors l’essentiel de ma vie. L’essentiel de la sienne aussi, car le lien qui nous unissait était fort. Il m’en reste des mots, un petit assemblage de papier, une couverture cartonnée souple dont le rose est devenu gris par endroit, d’avoir bourlingué longtemps de poche en tiroir, et de tiroir en boites.

Depuis le temps des petits carnets de ma grand mère, j’ai continué d’écrire. Toujours. Beaucoup. Partout. Tout le temps. Avec des passages plus ou moins intenses, plus ou moins forts, plus ou moins écervelés, égoïstes, fanfarons, tristes, troubles, larmoyants, orgueilleux, mensongers, fidèles, sincères, lucides, coléreux, passionnés, amoureux. Moi, quoi.

Comme tout le monde. Car tout le monde écrit, ne nous y trompons pas. Tout le monde, avec une forte inclinaison pour le « monde français », oui tout le monde écrit, plus ou moins bien, avec plus ou moins de talent, mais là n’est pas la question. La question c’est écrire. Écrire, aujourd’hui sur Facebook, hier sur un blog, demain sur ce qu’ils nous proposeront, vers lequel nous nous précipiterons tous, en espérant trouver le Graal : l’endroit idéal ou écrire redeviendrait, plus que la vie elle-,même, un art de vivre : celui qui consiste à etre  ou redevenir soi-meme.

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lmg , 1er janvier 2015